
CartONG soutient l’équipe EHA (Eau, Hygiène & Assainissement) du HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, depuis plus de 3 ans dans le cadre des déploiement des enquêtes CAP EHA – Connaissances, Attitudes, Pratiques sur les questions d’Eau, d’Hygiène & d’Assainissement – sur téléphones mobiles dans de nombreux pays. Depuis un an, dans le cadre de chaque formation au déploiement des enquêtes CAP EHA auprès des équipes HCR et de ses partenaires, nous avons aussi promu la cartographie des camps de réfugiés car cette dernière : 1- aide à planifier les aspects logistiques de l’enquête et l’échantillonnage, 2- permet d’analyser les résultats de l’enquête en prenant en considération le contexte spatial et la location exacte des infrastructures EHA. Nous pensons que cette approche permet l’améliorer l’accès global des réfugiés aux services d’eau, hygiène et assainissement sur le long terme.
Les défis associés au déploiement d'une enquête sans les avantages d'avoir un fond de carte
Bien que les sondages soient souvent utilisés dans les camps de réfugiés pour obtenir un aperçu des pratiques en matière d'eau et d'assainissement, il n'est pourtant pas courant de cartographier les résultats de l'enquête.
En effet, au cours des dernières années, les déploiements des enquêtes CAP EHA ont généralement eu lieu sans porter attention à la disponibilité d’un fond de carte pour le camp, ce qui signifiait que les résultats de l'enquête sur les ménages seraient tracés sur une toile vide (voir ci-contre) et, par conséquent, ne seraient pas d'une grande utilité pour comprendre le contexte spatial et les réponses apportées (ou à apporter) en fonction de l'emplacement réel de l'infrastructure.
Alors que la cartographie des résultats sans fond de carte permet au moins d'analyser la distribution et l'échantillonnage, pour voir si des réponses similaires sont regroupées dans la même zone, elle renvoie le responsable d’enquête sur le terrain pour comprendre si c'est la même source d'eau qui pourrait avoir un problème potentiel - ce qui conduit les ménages à ne pas avoir accès à la quantité minimum standardisée d'eau potable - ou si cela est causé par d'autres éléments.
Considérer la cartographie des camps comme une pré-étape pour soutenir les déploiements d'enquêtes
Conscient de ces défis, CartONG a donc décidé de revoir son approche de pré-déploiement et a suggéré, autant que possible, d'ajouter une première étape - la cartographie des camps de réfugiés - au processus de déploiement d'enquêtes. Comme toujours, il existe des façons, des approches et des outils différents pour cartographier une zone. Selon le type d'emplacement - par exemple, rural ou urbain - le type d'activités et la façon dont ces activités sont coordonnées parmi les acteurs, une approche adaptée au contexte, à la mise à l'échelle et au financement doit être choisie. Tandis que CartONG soutient également de plus larges activités cartographie des camps HCR basées sur des demandes de données spécifiques provenant de différents secteurs, donnant lieu à une base de données hébergée par le HCR, il n'y a pas toujours le temps, les ressources et le lieu pour organiser un tel effort intégré où la maintenance, le renforcement des capacités et la mise à jour des attributs doivent être pensés pour le rendre durable. CartONG explorait donc des moyens plus légers de créer ou d'améliorer un fond de carte qui nécessite moins d'engagement à long terme, car s'appuyant sur une plateforme et un effort communautaire.
Cette année, en préparation de différentes déploiements d'enquêtes CAP EHA auprès des ménages prévues au Cameroun, en République du Congo, au Burkina Faso, en Ouganda et au Soudan, CartONG a ainsi soutenu la cartographie des camps en amont ou pendant les premiers jours de la mission. Cet exercice a été réalisé soit par un personnel spécialisé sur le terrain effectuant une cartographie complète de l'ensemble du camp, soit par la mise en place d'un effort de cartographie collaborative dans le cadre du projet OpenStreetMap.
Pour ce dernier, les mapathons ont été mis en place en Europe avant ou pendant la mission pour aider à cartographier tout ce qui pouvait l’être à distance, dans les camps concernés, en dehors de ces camps ou les zones d'établissement des réfugiés. Les mapathons ont été organisées dans le cadre du projet Missing Maps dont CartONG est membre: des bénévoles ont ainsi cartographié à distance les lieux d'intérêt sur OpenStreetMap en utilisant l'imagerie satellitaire, et ensuite - lorsque c'était faisable - les données ont été améliorées en recueillant des informations pertinentes avec le personnel HCR sur le terrain, puis utilisées pour l'analyse de contexte dans différents produits de cartographie.
Cela fut notamment le cas pour la mission de déploiement de l'enquête de CAP EHA à Kiryandongo (Ouganda), qui eu lieu en juillet 2018. CartONG a réussi à organiser simultanément (voir ci-contre) un mapathon en France - avec le soutien d'un centre pour migrants et son partenaire Bibliothèque Sans Frontières - et un autre à Masindi (près du camp des réfugiés) avec les participants de la formation CAP EHA donnée à ce moment-là par CartONG.
Les deux groupes de bénévoles ont bénéficié des connaissances locales et du travail important qui avait été réalisé auparavant par l'équipe humanitaire OpenStreetMap d'Ouganda sur les données de l'infrastructure EHA du camp de Kiryandongo, et qui ont également animé le mapathon à Masindi. En tant que tel, CartONG a pu s'appuyer sur le partenariat local entre HOT et le HCR, tout en s'associant à la stratégie mondiale CAP EHA de l'Agence des Nations Unies. C'est un excellent exemple de la façon dont OpenStreetMap, en tant que plateforme ouverte de partage de données, génère naturellement des collaborations entre les organisations humanitaires.
Quels sont les impacts concrets de cette étape supplémentaire ? Observations autour du cas de Bétou
La mission de mise en œuvre ayant eu lieu en République du Congo en décembre dernier est un parfait exemple de la façon dont cette étape supplémentaire de cartographie des camps et des lieux de peuplement peut avoir un impact significatif sur la planification d'une enquête sur le terrain.
Juste avant le début de la mission, nous nous sommes rendu compte que les zones ciblées où les réfugiés - Bétou et Ikpemgbele - vivaient, étaient à peine cartographiées (voir l'exemple de Bétou ci-dessous sur la gauche). A Bétou, comme le déploiement de l'enquête devait être mené dans un milieu urbain - où la densité de la population est élevée - ne pas avoir une carte pour naviguer et organiser le travail des recenseurs ce serait avéré extrêmement difficile. CartONG a donc décidé de lancer un important projet OpenStreetMap pour aider à cartographier les bâtiments, les routes, les points d'intérêt et les zones administratives de la ville de Bétou (voir ci-dessus à droite). Alors que les volontaires du CartONG à distance cartographiaient les bâtiments et les routes, le personnel du HCR sur place concentrait son effort sur le traçage des limites administratives des quartiers qui, bien que connues oralement, n'avaient jamais été cartographiées auparavant.
Notre staff a aussi organisé un atelier de cartographie communautaire avec l'équipe du HCR locale pour collecter et centraliser les données, qui ont ensuite été utilisées pour assurer une base de référence géographique commune lors de la mise en œuvre de l'enquête. En fin de compte, les travaux de cartographie effectués pour Bétou étaient essentiels à la fois pour la stratégie d'échantillonnage et pour l'analyse des données dans ces zones à l’écart des camps de réfugiées traditionnelles. Un travail similaire a été effectué pour la région de Ikpemgbele. À la suite de cette mission, une série de cartes a été produite pour aider les équipes EHA du HCR à mieux comprendre leurs zones d'intervention.
Continuez le bon travail !
La cartographie n'a pas seulement été menée pour Bétou, Ikpemgbele (République du Congo) et Kiryandongo (Ouganda), mais aussi pour les deux camps de Mentao et Goudoubo (Burkina Faso). Globalement, un total de 9 241 bâtiments et 99 kilomètres de routes ont été ajoutés sur OpenStreetMap.
Grâce à ces contributions, les résultats du sondage CAP EHA sont devenus visibles sur un fond de carte actualisé pour les trois zones. Cela a ensuite permis au personnel du HCR de procéder à des analyses et de prendre des décisions éclairées concernant l'accès des réfugiés aux services EHA au sein de ces camps. Sur la gauche, l'exemple des résultats pilotes CAP EHA menés à Kiryandongo sont présentés sur un fond de carte représentant le camp de réfugiés, ce qui contribue à visualiser la capacité de stockage d'eau des ménages et de mettre cette information en relation avec la proximité des puits de forage.
Comme on peut le voir à travers ces exemples, l'accent mis sur la cartographie des camps et des zones de peuplement dans la phase précédant la mission s'est avéré pertinent pour faciliter les déploiements d'enquêtes et pour faciliter l'analyse des résultats d'enquêtes, en tenant compte du contexte spatial et de l’emplacement réel des infrastructures EHA. En tant que tel, cela a réaffirmé notre conviction que, ce faisant, nous pouvons aider à améliorer sur le long terme l'accès global des réfugiés aux services EHA.
CartONG souhaite poursuivre son travail en ce sens. À cette fin, nous avons organisé notre premier mapathon au siège du HCR à Genève en juillet dernier afin de cartographier davantage de camps de réfugiés en préparation des prochains déploiements, tel celui réalisé en septembre à Kosti (Soudan). Les prochaines étapes seront de continuer à intégrer cet effort au sein d'autres initiatives de cartographie de camps qui se déroulent au sein du HCR, afin d'assurer une approche davantage holistique. Nous cherchons actuellement à rendre les données OSM plus facilement accessibles et consultables dans une base de données SIG dédiée et à intégrer des données destinées à atteindre un public plus large et collectées par le biais d'autres méthodes, tel ArcGIS Collector, au sein de la plate-forme OSM. L'interopérabilité des données est en effet très importante pour pouvoir utiliser des jeux de données provenant de différents canaux. Alors restez connectés, car nous publierons dès que possible nos avancées en faveur de l'harmonisation de différents jeux de données pour favoriser la cartographie intégrée des camps de réfugiés.
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Vous voulez en savoir plus sur l'incroyable travail du staff et des partenaires de la section HCR dédiée à la santé publique au sein des camps de réfugiés ? Regardez les formations et la documentation disponibles sur la page des modules UNHCR WASH KAP. Son objectif principal est de former le personnel du HCR au déploiement des EHA CAP dans le cadre de contextes locaux différenciés en utilisant les technologies mobiles.